Tulle - 2013/2014
Résidence d'artiste à Tulle
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RÉSIDENCE D'ARTISTE À TULLE
Ma coopération avec Tulle s’inscrit dans une continuité :
- Commissaire d’exposition pour ART-connexion (Gard) à l’Église Saint Pierre de : « À PARTIR DE... Les femmes d’Alger d’Eugène Delacroix » (2009/2010) et « À PARTIR DE... Il Mondo Nuovo de Giandomenico Tiepolo » (2011/2012), expositions internationales itinérantes de petits formats.
- Responsable de l’exposition « Ah Bartleby ! Ah humanité ! » présentée par mes étudiants de l’ESAD / École supérieure d’art et de design d’Orléans à la Galerie/vitrine expérimentale le Point G (juin 2012).
- Exposition personnelle à La Cour des Arts : « par les jardins, les prés et les forêts... » (mai-juin 2012)
Mon exposition « les espaces du dessin » à l’Église Saint Pierre en septembre-octobre 2014 s’articule autour du concept de la dentelle et de l'ornementation, en tenant compte de la spécificité de chaque médium :
dentelle des traits du dessin, dentelle de la texture des feuilles et du paysage dans les photographies, inscription dans l’espace de l’Église Saint Pierre pour les installations, dentelles au Poinct de Tulle brodées par des dentellières à partir de mes dessins.
Les dessins, photographies, installations, dentelles au Poinct de Tulle sont réalisés pour ce lieu et pour cette exposition.
Pour cette résidence d'artiste, je vais à Tulle une semaine par mois pendant un an.
Oeuvres présentées à l’exposition :
1 > dessins, photographies, installations et interventions graphiques sur les murs et dans l’espace de l’Église Saint Pierre :
- des oeuvres réalisées pour le lieu avant l’exposition
- des dessins réalisés directement sur les murs pendant les deux semaines
d’installation de l’exposition
2 > dentelles au Poinct de Tulle réalisées à partir de mes dessins, en collaboration avec
les dentellières de l'association « Diffusion et Renouveau du Poinct de Tulle »
Ces pièces précieuses seront présentées dans le « Trésor » d’une chapelle proche
du choeur.
Un éclairage adapté fera émerger les dentelles de l’ombre.
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FIL
Depuis longtemps, il est question de dentelle à Tulle. C’est avec la signature des lettres patentes le 5 août 1665 par Colbert créant la manufacture d’Alençon, que cet artisanat d’art
va s’implanter à Tulle. Dans le même temps, Etienne Baluze en faisait l’ardente promotion à
la Cour du Roi. Pendant toute la fin du XVIIe siècle la dentelle de Tulle connait de beaux jours. C’est après la Révolution Française que va s’amorcer son déclin et tout au long du 19ème siècle. Essentiellement transmis oralement le PoInct de Tulle a été amené jusqu’à nous par quelques femmes dont des religieuses, puis les Veuves de guerre de 14-18 et aujourd’hui, depuis 1984, c’est l’association Diffusion et Renouveau du PoInct de Tulle qui travaille à la transmission du PoInct de Tulle.
FIL et un projet artistique qui associe autour de la Ville de Tulle plusieurs partenaires associatifs et des artistes et qui veut faire croiser ce savoir-faire séculaire exceptionnel avec
la création contemporaine.
Pour FIL, ce sont deux projets d'abord distincts qui ont avancé en parallèle puis se sont retrouvés : celui de Merveilleux Prétexte qui a invité pour une résidence les artistes Delphine Dewachter et Cécile Maulini, celui de la Cour des arts et de la Ville de Tulle avec Marie-Dominique Guibal.
De FIL en aiguille, il a semble opportun de relier ces événements et ces 3 artistes et de proposer un «environnement ». Le réseau s'est ensuite construit logiquement avec d'une part le Musée du Cloître qui propose dans ses collections des pièces du Poinct de Tulle et d'autre part, celles qui aujourd'hui continuent à transmettre ce savoir-faire : les dentelières de Tulle.
FIL, c'est en septembre-octobre 2014 cinq créations dans cinq sites différents, un travail conjoint entre les dentellières et les artistes, une création chorégraphique, une recherche ambitieuse qui s'installe, la réalisation d'un document vidéo sur l'expérience, des rencontres avec collégiens et lycéens.
FIL est un projet qui entre de plain-pied dans le postulat de la politique culturelle mise en place par la Ville de Tulle : créer du lien entre les différents acteurs et favoriser de nouvelles transversalités dans tous les domaines qui vont de la valorisation du patrimoine à la création artistique contemporaine.
FIL va se tisser avec le Musée du Cloître, la Cour des Arts, Merveilleux Prétexte, les dentelières du Poinct de Tulle, Peuple et Culture et les artistes Marie-Dominique Guibal, Delphine Dewachter, Cécile Maulini.
Agnès Gameiro-Delteil
Chargée de la culture et des coopérations - Ville de Tulle
Lieux d'exposition : L'Église Saint Pierre, le Musée du Cloître, la Galerie du Point G, l'Hôtel Lathonie, La Cour des arts.
Partenaires : Direction Régionale des Affaires Culturelles du Limousin, Conseil Régional du Limousin, Conseil Général de Corrèze, Fondation du Patrimoine, Tulle Agglo, Ville de Tulle, mécènes.
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LES ESPACES DU DESSIN
En 2000, j’ai commencé la série « Walking », dessins réalisés en marchant et en voyageant.
En 2011/2012, j’ai réalisé dessins, peintures et installations intitulés « promenade au jardin ».
Depuis mai 2012, je continue cette exploration dans une nouvelle série de dessins :
« PAYSAGES/plans-séquences ». Chaque plan séquence de dessin est réalisé en une seule fois, sans croquis préalable. Le point d’appui est le paysage. Chaque dessin est un temps et un espace graphique de présence au paysage.
Au début de la série, j’ai dessiné dans le train ou en voiture : le paysage défile. Ces dessins sont faits d’éléments graphiques de l’espace qui défile pendant une séquence de temps.
D’autres dessins ont été réalisés en marchant ou assise dans la nature.
Que ce soit dans le train, en voiture, en marchant ou bien assise dans la nature, je travaille la mobilité du regard, la légèreté du mouvement sur la feuille, la vivacité du trait.
La main suit le regard.
TGV/nuit - 7 mars 2013 : J’ai réalisé 28 dessins pendant un voyage en TGV.
Il faisait nuit ; mes dessins ne pouvaient pas s’appuyer directement sur le paysage qui défilait.
L’absence visuelle du paysage a concentré mon attention sur l’espace de la page, la structure et la texture du trait.
Les dessins sont venus de la mémoire du geste et de l’observation des feuilles.
Depuis, cette série s’articule entre des dessins réalisés à partir du paysage fixe ou en mouvement et des variations conceptuelles et graphiques du végétal dans l’espace de la page.
Je cherche à associer dans chaque mise en page la vision globale du paysage et des détails du végétal.
D’abord déclinés au fil des pages de carnets (format A5, A4, A3), les dessins de la série « PAYSAGES/plans-séquences » se développent aussi sur des supports autonomes et des formats diversifiés.
Par le cadrage, la mise en page, les pleins, les vides, les variations des traits et des gestes, j’explore la texture graphique du paysage et des feuilles.
Dans ces dessins, j’associe la recherche de la structure et de la texture - des paysages et du végétal - à la mise en page d’une recherche graphique.
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Mes dessins et plus particulièrement la série TGV/nuit,
ont été à l'origine de ma résidence d'artiste à Tulle et de ma collaboration avec les dentellières
de l'association « Diffusion et Renouveau du Poinct de Tulle ».
Une recherche sur les traits, les pleins, les vides et les transparences.
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TGV / nuit - 7 mars 2013
28 dessins
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LES ESPACES DU DESSIN ET DE LA DENTELLE
L'ORNEMENTATION
Le travail avec les dentellières de Tulle est fait de rencontres et de découvertes de nos manières de travailler - dessin, dentelle - avec la cohérence et les savoir-faire
de chacune.
C’est en reprenant le fil de mon travail sur l’ornementation - variations à partir des contours de feuilles de figuier - que mon projet s’est ajusté au travail des dentellières.
Notre collaboration se construit au fil des rencontres et permet d'explorer une organisation originale et innovante de la dentelle.
Cela amène à réfléchir sur l’adaptation, la traduction. Traduire, c’est tenir compte du fonctionnement de chaque langue, Poinct de Tulle et dessin.
À chaque langue, sa géographie, sa musique, sa poésie, son rythme, son espace.
Les 3 dentelles qui suivent ont été brodées à l'aiguille par des dentellières de Tulle, entre janvier et mars 2014.
Ces réalisations sont le fruit d'échanges réguliers.
30 x 30
12 x 60
12 x 38
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« comment je travaille avec les dentellières et propos artistiques »
Dans le cadre de ma résidence d'artiste à Tulle, je souhaitais « travailler-avec » les dentellières de Tulle, sans savoir au départ la forme que cela allait prendre. Nous avons commencé par nous rencontrer pour faire connaissance avec nos savoir-faire spécifiques et nos cohérences, en dessin et en dentelle.
Je leur ai montré des carnets de dessin dans lesquels je travaille la ligne, la dentelle du trait, le plein et le vide, la mise en page à partir de la nature et du paysage. Elles m'ont montré leurs dentelles dont j'ai découvert les espaces et les points.
Deux langues différentes et à chaque langue, sa géographie, son rythme, sa poésie. Cet échange m'intéresse.
Le travail avec les dentellières est une réflexion sur la « traduction ». Mon dessin est rythmé par le trait de contour et les espaces remplis et non remplis. Au Poinct de Tulle, mes traits sont traduits par le cordonnet. La règle est que le cordonnet passe uniquement sur le grossier.
J’ai commencé par réaliser plusieurs croquis avec des traits de contour de feuilles et des zones colorées correspondant aux différents points, puis j’ai travaillé avec des calques et des transparents. En reprenant le fil de mon travail sur l’ornementation mon projet s’est adapté au travail des dentellières. J’ai réalisé trois maquettes avec des contours de feuilles de figuier. Le placement du grossier et du cordonnet a permis aux dentellières de commencer à travailler en janvier 2014.
Les différents points (esprit, picot, respectueux, rosette, grossier) remplissent habituellement les espaces délimités par le cordonnet. L'heureuse suggestion d'une dentellière « vous n'êtes pas obligée de remplir, vous pouvez faire des petits carrés » a libéré mon propos.
Nous travaillons ensemble sur des maquettes que je propose. Les dentellières réagissent, suggèrent et je tiens compte de leurs avis. Nous ajustons ensemble. Cette collaboration dynamique permet d'explorer une organisation originale et innovante de la dentelle.
Marie-Dominique Guibal
29 avril 2014
article paru dans la Gazette spécial FIL
dans le cadre de la rencontre avec le public au Musée du Cloître de Tulle
mardi 27 mai à 18h30
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LES ESPACES DU DESSIN
installation de l'exposition à l'église Saint Pierre
fin août 2014
Marie-Dominique Guibal © Adagp